Belgrade; Serbie. 1990. « Ouvre. S'il te plaît! » Paul Stone-Jagger passa sa tête blonde par la fenêtre de son studio minable situé au rez-de-chaussée d'un vieil immeuble. Une jeune femme blonde attendait, à quelques mètres de la fenêtre, qu'il vienne ouvrir la porte. Cette jeune femme blonde, c'était Andrea, l'étudiante en arts qu'il avait rencontré lors de son premier voyage d'affaires, qui remontait maintenant à deux ans. Il se souvenait encore de leurs premiers baisers échangés furtivement aux quatre coins de la ville, des mots doux qu'ils s'échangeait malgré la barrière de la langue, la peur de la séparation. Aujourd'hui, il lui semblait que ces moments absolument parfait, il les avaient vécus dans une vie antérieur. Réprimant un soupir, le jeune américain ouvrit la porte d'entrée, pour lui permettre de pénétrer dans son petit studio. Chez lui, à Washington, il possédait un appartement immense, qu'il partageait avec son frère; mais lorsqu'il venait ici, à Belgrade, pour superviser la société que son père venait de monter, il occupait cet endroit aussi étroit que des toilettes. Pourquoi avait-il choisi ce studio d'étudiant? Lui même n'en avait toujours aucune idée. Toujours était-il qu'il ne voulait pas déménager. Andrea le croyait pauvre, et l'aimait malgré cela, il n'osait pas tout gâcher en lui avouant qu'il lui avait menti pendant deux longues années, et qu'en fait il n'était qu'un fils à papa, qui n'avait qu'à dégainer une de ses cartes de crédits pour obtenir ce qu'il souhaitait. Lorsque l'étudiante le frôla pour renter, un frisson parcouru son dos. Leur mariage approchait à grands pas, et presque rien n'était prêt, à part une minuscule salle de fête qui avait été louée pour l'occasion. Comme une adolescente, il avait toujours rêvé un mariage en grandes pompes: les mariés vêtus avec goûts, les témoins et demoiselles d'honneur sublimes, la salle immense et décorée par un expert, la pièce montée à plusieurs étages... Mais si il n'osait toujours rien dire, il risquait fort de se marier comme les anonymes, avec des vêtements discount et une pièce montée minuscule et immangeable. « Pourquoi tu fais cette tête? Dis le moi si tu ne veux pas me voir. » Paul releva les yeux vers elle. Le moment était arrivé. « Je crois qu'il faut que l'on parle. » Il voyait à la pâleur que son visage avait pris qu'elle commençait à s’inquiéter. Elle devait penser qu'il souhaitait annuler le mariage, ou quelque chose tout aussi absurde. « Tu sais, finalement on pourra l'avoir ce mariage de conte de fées. ». Un sourire éclaira son visage parfait, qui reprit quelques couleurs. Andrea posa ses orbes d'émeraude sur son futur mari, une expression dubitative sur le visage.« Grâce à quel argent? »« Le mien. »



Belgrade; Serbie. 1992. Un mariage plus que parfait, une petite fille adorable, un mari aimant, une maison gigantesque. Jamais Andrea n'aurait cru qu'une seule et même personne pouvait être comblée à ce point. D'accord, Paul lui avait menti durant de longs mois, mais ce n'était pas contre elle. Grâce à sa fortune, son mariage a pu se dérouler de la meilleure des façons. Elle était habillée en véritable princesse, avec une robe et des chaussures de créateur et une coiffure sublime faite par un des amis riches et célèbres de Paul. Celui-ci était, comme à son habitude, vêtu avec classe. Mais ce jour là on voyait qu'il avait fait un effort, et il était encore plus beau. La salle était immense, décorée d'une façon exquise; la pièce montée était à 10 étages, et deux statues de cires à leurs effigies avaient été commandées spécialement pour l'occasion. Deux groupes de rock américains connus dans le monde entier avait animés tout la soirée, et exactement une semaine après, Andrea avait appris qu'elle était enceinte. Maintenant, elle était une jeune maman comblée, et elle espérait déjà que sa fille Maja connaisse un bonheur au moins égale au sien tout au long de sa vie.

Belgrade; Serbie. 2005 « Qu'est-ce que tu veux aller faire à Prague? Pourquoi pas aller quelque part aux États-Unis ? Tu as de la famille au moins là bas. » Maja ne lâcherai pas le morceau si facilement. Elle voulait aller à Prague, alors elle irait à Prague. « Oui, mais l'agence où j'ai été prise se trouve à Prague. » Grâce à son corps filiforme et à son visage de félin, Maja avait pu trouver une agence de mannequin sans aucun problème. Elle en avait même trouver plusieurs, mais celle qui l'intéressait le plus se trouvait à Prague. La République Tchèque n'était qu'à 2 ou 3 heures d'avion, elle pourrait toujours revenir voir ses parents le week end. Elle avait réfléchit à tout, sauf au fait que ses parents ne seraient peut être pas d'accord de se séparer de leur seul enfant. Sa mère, comme toujours lorsque les esprits de son mari et de sa fille commençait à s'échauffer, intervint.« Écoute Maja, il y a des agences dans chaque pays, ne me dit pas que tu n'en as trouver aucune ici? La Serbie n'est quand même pas un pays si reculé ... » Un soupir s'échappa des lèvres de l'adolescente. Elle retenterait le coup quelques jours plus tard, là, c'était peine perdue.« Vous êtes vraiment injustes. Je ne vous ai jamais demander quoi que ce soit, je ne vous ai jamais donner de fil à retordre, j'ai toujours été la fille que tout le monde rêve d'avoir, et pour une fois que je vous demande une faveur, vous vous braquez et refusez alors que vous savez que ça ne peut m'apporter que du bonheur! Maman, je croyais que c'est ce que tu voulais, que je sois heureuse. » Sur ces belles paroles, elle sortit du grand salon, direction sa chambre. Elle savait qu'elle avait touché un point sensible chez sa mère, mais elle ne pensait pas qu'elle la mettrait presque dehors avec les poches pleines de billets, pour qu'elle puisse réaliser son rêve, et être heureuse. Une semaine plus tard, Maja Ivenka Stone-Jagger prit l'avion, direction Prague.

Prague; République Tchèque. 2011« Relève la tête! Baisse ton bras gauche! Voilà, bouges plus! ». Maja n'en pouvait plus, ça faisait trois longues heures qu'elle posait devant l'objectif d'Igor, pour une marque de prêt à porter. Les vêtements en polyester la grattait, et les flashs commençaient à lui faire mal aux yeux. Elle adorait vraiment son job de mannequin, mais ce jour là avec la fatigue, combinée au froid et à la faim qui la tenaillait, elle n'était pas d'humeur à apprécier son métier. Igor lui prit la tête et l'obligea à se tordre dans tout les sens pendant une heure de plus, et lorsqu'il prit enfin la peine de la laisser partir, elle ne passa pas par la cage démaquillage et rentra directement chez elle. Elle n'était pas encore assez célèbre dans le monde de la mode pour pouvoir avoir le niveau de vie auquel ses parents l'avaient habitué, mais grâce à son compte en banque rempli par papa, elle louait un appartement sublime quand un des plus beaux quartiers de la ville et avait toutes sortes d'activités plus ou moins chères. Sa vie à Prague ne faisait que commencer.